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Autorités et régulation du travail dans le champ de la construction (XIIIe-XIXe siècle) 

Coordinateurs : Philippe Bernardi, Robert Carvais et Nicoletta Rolla.

 

JEUDI 2 NOVEMBRE

 

10h30-12h30: Session 1 - Institutions

 

10h30-11h00: Philippe Lardin (Université de Rouen),

Le rôle des maitres des œuvres dans le lancement, le déroulement et le paiement des travaux de construction (XIVe-XVe siècle).

Les organismes qui possédaient des bâtiments (le roi, les cathédrales, les abbayes, les paroisses) les confiaient généralement à des hommes que les textes appellent maîtres des œuvres. Cette fonction a souvent été confondue avec celle d’architectes, mais s’il est vrai que ces hommes ont parfois été amenés à penser des constructions nouvelles ou des transformations importantes, leur rôle était en réalité beaucoup plus complexe. Ils étaient d’ailleurs souvent deux à s’occuper des mêmes bâtiments, l’un pour la charpenterie, l’autre pour la maçonnerie mais ils s’occupaient aussi des autres aspects d’un chantier comme le travail des métaux ou le plâtre.

Leurs activités étaient en effet très diverses. Ils choisissaient en accord avec leurs employeurs le mode de paiement du chantier, à la tâche ou à la journée. Ils préparaient les travaux en organisant la fourniture de matière première et en mettant en place des infrastructures comme les fours à chaux ou les fosses pour la fonte des cloches. Ils recrutaient les ouvriers quand ceux-ci n’étaient pas employés à demeure par l’organisme qu’ils représentaient. Ils surveillaient le déroulement des travaux auxquels ils participaient parfois. Ils participaient enfin à la visite finale qui constatait l’achèvement ou les défauts du chantier à corriger, puis ils autorisaient les paiements des ouvriers ou du responsable des travaux ainsi que celui des fournisseurs de matières premières.

Ils ne limitaient pas leurs interventions aux chantiers lancés par les organismes dont ils étaient les représentants. Ils étaient fréquemment appelés pour estimer la valeur de maisons de particuliers qui devaient être abattues ou qui donnaient lieu à des contestations entre héritiers. Ils participaient à des commissions qui rédigeaient des devis pour des chantiers importants comme celui de la création du port du Havre.  Ils pouvaient aussi avoir leur propre entreprise et compléter leurs revenus par des chantiers privés.

Ils étaient donc indispensables au fonctionnement de nombreux chantiers et à l’entretien de bien des bâtiments publics ou religieux.

Cette communication s’appuiera sur les comptabilités conservées par les divers organismes impliqués dans la construction ainsi que sur les registres de tabellionage.     

 

 

11 h00-11h30 : Arnaldo Sousa Melo (Universidade do Minho)

Les rapports de travail dans les chantiers royaux portugais au XVe – début XVIe siècle.

Le but de cette communication est de présenter les formes d’organisation des chantiers et de l’organisation du travail dans les chantiers royales portugais do XV début XVI siècles, en différents lieux et contextes. Les grands chantiers de construction au Portugal comme le monastère des Jeronimos et Batalha, mais aussi dans les nouveaux territoires, comme la construction de la Douane du Funchal (Ile de Madeira) ou des villes portugaises du Nord-ouest africain (aujourd’hui Maroc), comme Alcácer-Ceguer ou Tanger.

Les rapports de travail sont très variés entre les différents chantiers, mais aussi dans le même chantier au cours du temps et aussi dans le même chantier dans un même moment et parfois avec les mêmes personnes.

Par exemple on trouve un maçon employé comme fonctionnaire du chantier dans la longue durée, avec un salaire ou rémunération à l’an et qui en même temps fait un contrat de commande à forfait pour l’exécution d’une partie spécifique de la construction.

En effet on trouve trois grandes formes de rémunération : à la journée ; à la tâche, notamment à travers des contrats à forfait pour l’exécution d’une partie spécifique du bâtiment, dans un délai de temps défini et à prix fait, ou alors un paiement par unité d'aire construite dans le secteur défini.

Différentes formes de rémunération qui correspondent à différentes formes de rapports de travail : embauche à la longe durée comme « fonctionnaires » du chantier ; embauche pour un service ou tâche spécifique dans une durée réaccordé ; ou embauche par unité de temps - au mois, à la semaine, au jour – qui peut être, ou pas, renouvelée selon les besoins et volontés des parts. Pour chacun de ces formes d’embauche il peut exister une ou diverses formes de rémunération.

Et tout ça pouvait exister à travers des embauches de travail collective (de groupe), ou individuelles. Et pour différents métiers, les un très spécialisés, comme les meilleurs maçons ou charpentiers, d’autres pour travail indifférencié, ou non spécialisé, bien que selon des modalités et expressions concrètes différentes.

La régulation du travail se présente comme très plastique et adaptable dans ces grands chantiers. Peut-être parce qu’ils étaient des chantiers du roi.

La comparaison entre ces différents chantiers en contexte historiques et géographiques aussi différents, ayant en commun le fait d’être des chantiers du Roy du Portugal, c’est aussi une dimension que je trouve très intéressante et importante.

Les sources utilisées sont surtout des livres de comptes, réglementations et contrats des archives royales portugaises des grands chantiers nommées et aussi des villes d’autre mer au Nord d’Afrique.

 

 

11h30-12h00 : Sandrine Victor

Les règlements de Mostassafaria : réglementer le marché pour réglementer le travail ?

Le Mostassaf est un agent municipal gérant les réglementations des marchés. Héritier de l’organisation urbaine arabo-musulmane, il est une figure classique des aires catalanes, baléares et aragonaises au bas Moyen Âge. Nous le retrouvons également, sous le nom de amotacèn, en Castille. Cet agent municipal intervient dans tous les secteurs de l’activité économique locale, réglementant et intervenant directement pour des sentences immédiates. Gardien des poids et mesures, il contrôle et intervient dans la production, les conditions de vente, la qualité des produits, la gestion sanitaire de l’espace du marché, la protection du consommateur et les fraudes.  Les Livres d’ordonnances de Mostassafaria sont conservées dans les archives de la Couronne d’Aragon (Gérone, Palma, Barcelone, Valence). Nous pouvons avec profit envisager de les compléter par les ordonnances municipales, en particulier dans le cas géronais, complémentaires de l’action du Mostassaf et appliquées par lui. Grâce à ses sources, nous pouvons proposer tout d’abord une nouvelle lecture des cadres de réglementation du travail par les Métiers dans leur application au quotidien. Le Mostassaf, en intervenant dans le domaine de la qualité des produits ou dans les modalités de la vente, se superpose-t-il aux normes des Métiers, ou les contraint-il ? De ce fait, peut-on voir dans l’application des réglementations des normes de qualité, de vente et de production sur les marchés un moyen de contrôle par les autorités municipales des conditions et modalités de travail des ouvriers du bâtiment, contrôle qui leur échappent théoriquement. Enfin, les prudhommes représentants les Métiers ont-ils un moyen d’intervenir dans la définition et l’application les règlements de Mostassafaria ? C’est à partir de cette grille de lecture que nous souhaitons interroger à la fois cette source, que l’historiographie a souvent retenue pour lire uniquement la réglementation sanitaire de l’espace du marché, et  la régulation du travail par une autorité hors des cadres des Métiers constitués.

 

 

12h00-12h30 : Antoine Baudry (Université de Liège),

Restaurer les monuments historiques à Liège entre 1830 et 1880 : acteurs et autorités publics.

Porté sur les fonts baptismaux européens en 1830, le Royaume de Belgique, dès les premières décennies de son existence, se lance dans une ambitieuse politique de conservation et de restauration de ses monuments historiques, clef majeure d’une quête identitaire étatique dont les rouages institutionnels se mettent rapidement en place. Traditionnellement, l’historiographie belge tend à concentrer cette charge entre les mains de deux acteurs : l’architecte en charge du projet, indépendant, et la Commission royale des Monuments, organe gouvernemental consultatif. S’il est indéniable que ces deux acteurs aient joué un rôle prépondérant en la matière, l’étude minutieuse des chantiers de restauration permet d’envisager une mosaïque professionnelle nettement plus diversifiée. Fabriques d’églises, administrations locales et régionales, architectes communaux et provinciaux, ministères (de l’Intérieur, de la Justice, de l’Agriculture, des Travaux Publics), ingénieurs associés (des Ponts et Chaussées, des Mines), monarque, Comité des membres correspondants provinciaux (apparu en 1860), Gilde de saint Thomas et de saint Luc (apparue en 1863) ou encore presse locale, tous interviennent au cours du chantier, instant-pivot où se superposent les influences, se chevauchent les compétences, s’affrontent les prérogatives, se prennent les décisions, se créent et se règlent les conflits.

Cette communication propose d’étudier les champs de compétences respectifs de ces différents acteurs au sein d’une même ville, Liège, ancienne capitale de la principauté éponyme, où une quinzaine de chantiers de restauration ambitieux sont menés au cours du XIXe siècle. L’objectif est ainsi de démontrer, au travers de cas concrets (projets aboutis et non aboutis), les influences réelles des uns et des autres, et donc le poids effectif de chacun sur l’échiquier de la restauration architecturale. Une démarche comparative peut également être établie à l’échelle de la province de Liège, afin de mesurer l’équité ou la non-équité de traitement entre les grands chantiers de restauration urbains et ceux situés dans les campagnes plus reculées. Pour ce faire, ce travail s’appuie sur le dépouillement de plusieurs milliers de courriers échangés par ces diverses instances, et aujourd’hui conservés dans divers dépôts (Archives Générales du Royaume à Bruxelles, Archives de l’État à Liège, Archives de la Commission royale des Monuments, Sites et Fouilles, archives des Fabriques d’églises, archives communales, fonds privés, etc.).

 

14h00-15h30 : Session 2 - Corps

 

14h00-14h30 : Lucie Laumonier (University of Calgary)

Travail et travailleurs de la construction à Montpellier aux XIVe et XVe siècles.

Cette communication vise à examiner les phénomènes d’autorité et de régulation dans les métiers de la construction à Montpellier aux XIVe et XVe siècles en s’intéressant à deux niveaux de leur expression : la sphère publique d’une part (réglementation des métiers de la construction, leur place dans la vie politique et dans la hiérarchie sociale de la ville) et la sphère privée d’autre part (l’influence du cadre législatif sur les pratiques individuelles, la répartition du travail sur les chantiers et des fortunes au sein des travailleurs de la construction). Les chantiers et activités ne manquaient pas pour les travailleurs de la construction dans la ville ; outre les commandes privées, ils travaillent à l’entretien et réfection des murailles, et à grands projets tels que le collège-monastère Saint-Benoît et Saint Germain (étudié par Ph. Bernardi), ou celui du monastère des repenties entamé à la fin des années 1380.

La plupart des statuts de métiers conservés à Montpellier datent des XIVe et XVe siècles. Ils étaient accordés aux corps de métiers par les consuls et le seigneur de la ville. L’on dispose ainsi de statuts pour les charpentiers (1304), les tailleurs de pierre et maçons (1366), et pour les peintres et verriers (1400). Les corps de métiers s’étaient développés en soutenant l’émergence de l’universitas. Avant même que des statuts de métiers ne soient rédigés – ou n’aient survécu au passage du temps – les groupements professionnels étaient associés à la garde des murs de la ville (début du XIIIe siècle) ; aux élections consulaires (mi XIIIe siècle). Les sièges consulaires étaient répartis entre les membres de certains métiers et ceux de la construction y étaient représentés : le onzième consul était charpentier ou tailleur de pierre. Les métiers étaient aussi invités aux processions générales et prenaient une part active à la fête de la Charité, au cours de laquelle ils distribuaient des centaines de pains aux pauvres.

Les corps de métier jouaient un rôle de premier plan dans la vie politique locale et constituaient une forme structurante d’organisation sociale établie dès les premiers temps de l’histoire consulaire montpelliéraine. La vie quotidienne des artisans était ainsi fortement régulée par le métier. Les archives notariales sont abondantes qui renseignent tant sur le travail des artisans (prix-faits, commandes privées et publiques) que sur les relations de travail et les rapports d’autorité entre les travailleurs (contrats d’apprentissage et d’embauche). Contrats de mariage et testaments lèvent une partie du voile sur la vie quotidienne des artisans et de leurs familles, sur les biens qu’ils possédaient, sur la nature de leurs réseaux familiaux, amicaux et professionnels – et les moyens mis à disposition pour protéger leur patrimoine, ou grimper l’échelle sociale.

 

 

14h30-15h00 : Hugo Perina, (EHESS, Paris)

Enjeux collectifs et individuels de la construction et de la commande d’orgue en Italie (1400-1550).

Il y a pour Philippe Braunstein deux types de nouveautés au Moyen âge : l’invention, fruit d’une créativité qui sort des usages établis et l’aboutissement d’un progrès technique rationnalisé. Le chantier de construction d’un nouvel orgue dans l’Italie de la Renaissance s’inscrit dans le mouvement d’innovation technologique caractéristique de la fin du Moyen âge. Il ne s’agira pas ici de détailler les apports strictement techniques de la facture des XVe et XVIe s. à l’orgue, mais plutôt d’étudier sa conception du point de vue de l’artisanat autant que de celui des commanditaires. A partir de la mise en tribune des orgues du nouveau duomo de Florence par Brunelleschi dans les années 1430, l’instrument fait partie intégrante du projet architectural et donc entre dans une dynamique de commande de bien plus grande ampleur que les autres instruments. L’implication d’un architecte dans la conception d’un orgue révèle l’extension des corps de métiers convoqués autour du dessin, programme d’un nouvel instrument : ébéniste, charpentier, forgeron, doreur, peintre, sculpteur, maçon, etc. Ces corps de métiers peuvent faire l’objet d’une organisation quelconque mais les facteurs d’orgues, eux, sont totalement détachés de toute espèce de regroupement.

L’étude des contrats et des comptabilités institutionnelles que j’ai entreprise révèle peu de noms, en dehors de celui du facteur, et peu de détails sur ceux qui travaillent à un orgue.

Leur évocation est brève, souvent anonyme ou incomplète, ce qui rend difficile le recoupement d’un orgue à l’autre. Sur les quelques six-cents-cinquante orgues répertoriés dans ma base de données, seulement cent-cinquante entrées contiennent des informations sur des artisans autres que facteur d’orgues. Pour ceux que nous connaissons, nous pourrions attendre, au moins dans une même ville, à trouver quelques artisans sur plusieurs chantiers successifs mais il n’en est rien. Quelques exceptions sont à relever, dont Domenico di Zanobi qui dirige successivement les travaux de la tribune et du buffet des cathédrales de Lucques (1480) et de Pise (entre 1489 et 1491). L’activité et les déplacements des facteurs les plus renommés sont a contrario bien mieux documentés et je peux, grâce à divers recoupement, retracer l’itinéraire de plusieurs d’entre eux qui donnent finalement à voir les grands axes d’échanges culturels propres à l’Italie septentrionale.

Comment l’orgue, qui défie la distinction mobilier/immobilier, est-il pris en charge et par qui ? Si le prix d’un orgue est difficile à connaître avec exactitude, il est clair que sa fabrication représente un investissement financier considérable de la part des commanditaires engagés dans cette démarche. Or cet investissement ne saurait être uniquement financier : il dit quelque chose d’un projet d’ordre politique, public et religieux. Le profil des commanditaires doit s’étudier dans un contexte institutionnel basé sur une association diversement articulée entre les pouvoirs religieux, civil et princier qui parfois font alliance autour de tel ou tel projet de construction d’orgue. Près de la moitié des opérations (construction ou réfection) recensées dans ma base de données se déroulent dans une cathédrale. Une bonne centaine d’autres proviennent d’ordres mendiants. Dans la sphère communautaire comme à la cathédrale, la commande peut provenir de la communauté en tant qu’institut ou d’un individu issu de la communauté.

Il s’agira donc d’offrir, depuis la tribune de l’orgue et à partir de la compilation de centaines d’extraits d’archives, un panorama embrassant les relations de l’artisanat à l’organologie et aux commanditaires dans toute leur complexité et leur richesse.

 

 

15h00-15h30: Susan Galavan (University of Leuven)

The building labourer in Dublin’s Victorian age: Poor slaves or righteous crusaders?

This paper will explore the theme of agency on the construction site through the lens of the nineteenth-century builder. It will focus on Michael Meade & Son, Dublin’s largest building firm during the Victorian age, which constructed a wide range of projects and employed 900 workers. It will show that the building site was a complex operation, with various classes of labourer giving rise to disproportionate earning potential within the industry. How did building firms control the status of their workers and what was their attitude to their employees and their unions, who were increasingly involved in labor disputes? Using a range of sources from contemporary building journals to newspapers and rare archival material, this paper will trace the changing role of building labor in the city within the context of wider developments in employment law. How did these changes in turn affect the day-to-day operation of the building site, from the length of the working day to commuting time and increased pay? In shining a light on some of the hands that shaped Dublin’s Victorian facades, this paper reveals the impact of the builder’s labourer on the Irish capital during the time of its greatest expansion.

 

 

16h00-17h30: Session 3 - Enterprises

 

16h00-16h30: Merlijn Hurx (Utrecht University)

Grant marchants and aennemers. The rise of the building contactor in the fifteenth century in the Low Countries.

Studies on the construction industry have traditionally defined the dissolution of the craft guilds following the French Revolution as a defining moment in the development of the modern building industry. Liberated from the economic constraints of the guilds, the building sector became increasingly dominated by large scale building enterprises, general contractors, and competitive biddings. The organisational transformation in the nineteenth century has usually been interpreted as a breach with traditional practice, however its historical roots have long been overlooked or ignored in historiography.

In this paper, I will argue that many developments that are considered typical to the nineteenth century can be traced back to the late Middle Ages. After the mid-fourteenth century various parts of Europe experienced a commercialisation of the building industry, and in this development the Low Countries stand out. It seems that the sheer importance of the market, in which affluent contractors had an important share in the construction of public buildings, was exceptional. Where large public building projects had once usually been brought to fruition under a patron’s management, private construction firms now performed a growing portion of the work at the expense of mason’s lodges. The veritable building boom that followed the rapid urbanisation of the cities in Flanders, Brabant and Holland from the mid-fourteenth century propelled the development of the market. An elite group of supraregionally active builders developed, who competed for contracted work through public tenders. Often such tenders split up the work by craft, however the entire project could be assigned to a single contractor as well. Based on exhaustive archival research, my contribution will question the structure and nature of the construction market, as well as the circumstances that brought it to fruition. In addition, it will consider the position of the guilds towards these large-scale enterprises. To shed light on the significance, scale and geographical scope of such enterprises, I will present the operations of one of the leading fifteenth-century Brussels stone merchants, who was active simultaneously at the most important sites throughout the Low Countries. His products and services ranged in scale and complexity from the procurement of building materials to the assembly of the masonry of an entire building.

 

16h30-17h00 : Léonore Losserand (Université Paris-Sorbonne)

Contribution à l’histoire des entrepreneurs : Guillaume de la Vergne, un exemple parisien à cheval entre le XVIIe et le XVIIIe siècle.

L’historiographie sur les entrepreneurs manque d’étude biographique, ainsi que l’ont encore constaté en 2014, Inge Bertels, Heidi Deneweth, Boris Horemans et Stéphanie Van de Voorde (2CFHC). Nous voulons apporter notre contribution à cette recherche forcément collective en proposant dans un premier temps une étude biographique sur la figure d’entrepreneur à cheval entre le grand siècle et le siècle des Lumières : Guillaume de la Vergne.

A l’instar de la plupart des entrepreneurs de son temps, la carrière de cet entrepreneur n’a pas encore fait l’objet de l’attention des chercheurs, alors qu’il est intervenu sur des chantiers majeurs de son temps. Il est désormais possible de mieux retracer sa carrière grâce à la découverte de plusieurs documents d’archives émanant des greffiers des Bâtiments et des contrats (devis, transaction, quittances) passés devant notaires : logement des équipages du conseiller général des finances rue de Normandie (1699), hôtel de Soubise (1705), chevet de l’église Saint-Roch (1706-1709), hôtel Richelieu (1706), couvent des hospitalières de Saint-Mandé (1706), etc.

Pourtant, la décennie sur laquelle nous pouvons documenter son activité n’est pas la plus féconde en terme de construction dans la capitale où les chantiers reprennent progressivement après la crise de subsistance des années 1693-1694.

Dans cette communication nous chercherons également à faire ressortir les enjeux de son action et de ses responsabilités dans ces chantiers dans une période peu propice à l'entreprenariat. Son action sur le marché du travail s’est achevée par sa mort brutale en 1710 et les scellés après décès nous révèlent un nombre important de créanciers qui montre quel métier à risque les entrepreneurs exerçaient et les rapports qu’ils entretenaient avec les différents corps de métier. Tout en tentant de comprendre les raisons d’une si tragique, nous apporterons un éclairage plus particulier à ses interventions dans le secteur religieux en comparant avec le cas contemporain de la nef de Saint-Louis-en-l’Île, elle aussi confiée à des entrepreneurs.

 

 

17h00-17h30 : Renaud Bueb (Université de Franche-Comté)

Les paradoxes de l’interdiction du marchandage : pratique et contrats de sous-entreprise dans le marché de la construction au 19e siècle

Le marchandage, convention de sous-entreprise, est d'usage dans les métiers du bâtiment. C'est là une des originalités de l'organisation et de la régulation du marché du travail dans ce secteur. En 1848, la république proclame son abolition (le marchandage est toujours prohibé à l'article L 8231-1 du code du travail). Marchander le travail devient un délit. Et pourtant, dans la réalité, le marchandage est toujours en vigueur, contra legem, principalement dans le secteur de la construction. Paradoxe ? Non, le marché du travail dans la construction et le bâtiment a toujours fonctionné avec la sous-entreprise (sous-traitance) : le propriétaire fait appel à un professionnel, un entrepreneur, qui sous-traite à des équipes, des tâcherons ou des artisans spécialisés la réalisation de l'ouvrage. Les juridictions se prononcent sur les obligations des parties, la responsabilité de l'entrepreneur, la nature de la rémunération, elles font respecter les usages de la profession. Les interprétations des tribunaux divergent. Certaines affaires posent la question de l’abolition du marchandage et les juges doivent alors faire le partage entre les pratiques autorisées et les celles qui sont interdites. Les décisions montrent les différentes pratiques de sous-entreprise à cette époque dans le marché de la construction. Les ouvriers du bâtiment continuent de réclamer l'abolition du marchandage. Le législateur de la III° république se saisit de la question : plusieurs projets seront présentés, discutés, sans aboutir. Après une première cassation, en 1901 les chambres réunies de la Cour de cassation mettent un point final à cette controverse et donnent l'interprétation officielle et l'étendue de l'interdiction de 1848. La communication se propose de faire le point sur cette affaire du marchandage au 19° siècle, dans le secteur de la construction (bien qu'il existe ailleurs) en s'intéressant particulièrement à l'aspect juridique : le droit sera vu bien sûr sous son aspect technique, sa rationalité propre, mais aussi comme phénomène social, révélant les pratiques, la dynamique des normes, les rapports de forces et les aspirations contradictoires des acteurs de la controverse.

 

 

 

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